Le cursus

Nos tout premiers entretiens en tant que psychologue

Dans cet article, j’ai voulu réunir plusieurs témoignages sur les premiers entretiens de psychologues au tout début de leur prise de poste, ainsi que certains étudiants de Master 2. Cet article a pour fonction de vous rassurer, c’est normal d’avoir l’impression de ne pas “tout savoir”, d’avoir l’impression qu’on peut être côté… On passe tous-tes par des phases de doutes et j’ai voulu réunir plusieurs témoignages différents pour l’illustrer.

Psychologue anonyme, diplômée depuis 8 mois.

J’ai réalisé un premier entretien, seule à seule, durant mon stage de Master 2, dans le service d’orientation de l’université. J’ai vu une étudiante étrangère qui souhaitait se réorienter dans une autre filière. J’avais beaucoup d’appréhensions évidemment, mais l’entretien s’est bien déroulé (j’avais préparé les différents thèmes à aborder, ce qui m’a aidé à faire un déroulé à quoi me raccrocher, étant hyper anxieuse lol). Finalement, la capacité d’écoute que l’on apprend reste la base de l’entretien, et on arrive à plus ou moins s’autoriser à se laisser « porter » par le discours. Mais effectivement, ce n’était pas facile de savoir « jusqu’où aller » et connaître les limites de mon champs d’action (en particulier dans l’orientation).”

Lucie, psychologue depuis 7 ans

« Mon premier poste c’était en CMP adultes. J’étais terrifiée quand j’ai dû appeler une patiente pour lui proposer un rdv. J’avais déjà eu l’occasion de mener des entretiens seuls en stage (suivis sur plusieurs mois) mais là le fait d’être seule aux manettes était hyper impressionnant. Surtout que j’avais 22 ans et que je faisais encore plus jeune. J’avais peur que mon âge freine les patients. Finalement le premier entretien s’est super bien passé, la patiente avait  »simplement » besoin d’une oreille attentive. Ce n’était pas une situation trop lourde non plus, c’était pas plus mal pour commencer. Et entretien par entretien j’ai pris confiance en moi. […] Maintenant que j’accueille des stagiaires à mon tour je leur dis toujours que le plus important selon moi c’est d’être authentique. Et un(e) superviseur(e) bienveillant(e).

J’ajoute à mon message précédent : nous en sortant de la fac on se compare à des psys déjà expérimentés. Les patients ont moins de représentations que nous. Ils mettent la barre bien moins haute. Ils ont surtout besoin d’une rencontre, d’avoir confiance, et de quelqu’un qui cherchera réellement à les aider, peu importe le temps que ça prendra. »

Laura, psychologue depuis 10 ans

« J’ai une bonne anecdote sur un de mes premiers entretiens (il y a plus de 10 ans maintenant), je pense que j’avais trop envie de bien faire et de prendre vraiment mon temps pour mes premiers patients, du coup l’heure tournait et comme ça déborde toujours aux premiers là où je pensais que ça avait duré 2h (et déjà c’était quand même beaucoup) …en fait on était resté 3h… erreur de débutant, mais c’était très très intéressant !!”

Sarah, psychologue depuis 7 mois

« Je suis psychologue depuis quelques mois. Pour ma part, j’appréhendais beaucoup mes premiers entretiens seule. Au final, j’ai vraiment tentée d’être moi-même et à l’aise avec le cadre et ma personnalité … et c’était génial ! Ça a très bien fonctionné avec les personnes que j’accompagne, Ils m’ont par la suite témoigné un ressenti de sincérité dans ma démarche.

Depuis, j’appréhende toujours les premières rencontres mais je me raccroche toujours à l’idée d’être le plus proche possible de qui je suis et de bien prendre le temps d’expliquer et co-construire certaines modalités du cadre (le tutoiement ou non, la fréquence des rencontres …). Je me pose toujours des questions sur ma manière de gérer les entretiens, de me dévoiler ou non, la meilleure façon de prendre des notes et/ou de les laisser quand le moment ne s’y prête pas … Ce qui m’aide beaucoup c’est l’inter vision et le témoignage des autres psys de mon entourage, et le retour des personnes que j’accompagne !”

Laurie, psychologue depuis 2018

« Alors pour ma part au début j’avais le gros syndrome de l’imposteur… […]. Pour moi après mes années d’étude et de stage j’avais comme l’impression de ne « rien savoir ». […] Dans mon premier poste cela s’est rapidement atténué par le travail en équipe, les réunions où j’apprenais beaucoup et où je voyais que mes pistes de réflexions étaient pertinentes. Puis quelques années plus tard j’ai eu l’occasion de m’installer une journée en libéral. Et là… le syndrome de l’imposteur est revenu très très fort accompagné de mon anxiété… Heureusement en parallèle j’ai fait des formations, eu un accompagnement psychologique et de la supervision. Pour ma part ces espaces ont été nécessaires et m’ont vraiment aidé à mieux me positionner et ne pas m’épuiser psychologiquement. Au bout de quelques années je me sens enfin légitime mais cela a été assez long. Je me sentais avec une grosse responsabilité sur les épaules, avec toujours l’envie que les patients « avancent », que je devais « leur apporter quelque chose » et cela était source de stress. Puis désormais avec les formations et supervisions cela m’a permis de trouver le bon positionnement tout doucement »

Emeline, psychologue spécialisée en neuropsychologie, diplômée depuis 9 mois

“Je pense que je n’ai pas dormi la nuit qui a précédé mes premiers entretiens et encore moins lors de ma première “rencontre” avec un patient. J’avais l’impression de repasser l’oral devant le grand jury de ma dernière année et peut être aussi le bac en même temps ! Je suis passée par toutes les émotions possibles, j’ai fait tout un tas de scénario et créer comme une carte de bingo de ce qui pourrait m’arriver. Et spoil alert, cela ne sait pas du tout passer comme je l’imaginais.

Certaines de ces choses que j’ai anticipées ne se sont pas déroulées et il y a des choses auxquelles je n’avais pas pensé :

  • Je bafouille, je me contredis parce qu’entre le début et la fin de notre rendez-vous, j’ai changé d’idée ;
  • Je “bugue” et n’entends plus parce que je suis en train de saisir en temps réel ce que l’on me dit et de réfléchir à comment je peux rebondir/relancer mon patient ou si le laisser élaborer est préférable ;
  • Je ne me fais pas comprendre, parce qu’expliquer à quelqu’un ce que l’on a mis 5 ans à apprendre, et bien ce n’est pas évident ;
  • Quelqu’un qui remet en doute mes compétences et mes connaissances

Étant neuropsychologue en pédopsychiatrie, je suis amenée à rencontrer les parents des loulous que je rencontre en bilan. Tout un autre challenge et d’autres émotions. Mais je me suis rendu assez vite compte que pour la plupart, ils étaient encore plus anxieux et plus démunis que moi face aux situations qui sont vécues par leur entourage.[…] Il n’y en a pas un entretien après lequel je ne me suis pas dit : j’aurai pu faire mieux, mieux me préparer, mieux anticiper, être plus précise, plus clinique. Et quand je me revois il y a 9 mois, à peine diplômée et déjà devant des patients, mes patients à moi. Je vois les progrès que j’ai faits et j’essaye d’être indulgente avec moi-même. […] Je pense que mon anxiété est toujours et sera toujours présente. Je pense que je ferai toujours des erreurs, je pense que je me critiquerai toujours sur ma façon de mener un entretien. Juste mon regard, dessus, sera mon dur. Je pense que c’est cela que l’expérience nous apprend. A être critique tout en étant bienveillant. Principe que l’on se doit d’appliquer avec nos patients, et pourquoi pas à nous-même ?”

Si vous souhaitez contribuez à ces témoignages, n’hésitez pas à nous partager les votre en commentaire !

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